« Alex Vizorek est une œuvre d’art », c’est lui-même qui le dit de lui-même. Il l’a prouvé dans son one man show, en tournée pendant dix ans à Uccle, en France et ailleurs. À vérifier au CCU en mai, avec son nouveau spectacle, Ad vitam.
L’humoriste belge est un bosseur, en mode rieur ravi de poser ses blagues comme le coussin péteur des gamins. Ingénieux acteur plutôt qu’ingénieur, malgré ou à cause de ses études à Solvay et à l’ULB en journalisme.
Dans la vie, ce tout frais quadra ne fait que ce qui lui plaît. Alors, il bosse, boosté à l’adrénaline du rire parce que le travail c’est son bonheur. « Je suis tout le temps heureux dans mon métier…. Quand je n’ai pas d’angoisse et que je sais que j’ai des dates prévues pour les deux ans à venir. » Quand il est heureux, Alex Vizorek se sent « plus disponible à être un bon fils, un bon frère, un bon conjoint, un bon ami». Et plus ouvert aux petits bonheurs de la bière autour d’une bonne blague avec ses potes de Bruxelles. La blague, volontiers impertinente, mais toujours bienveillante, celle qui autorise la distance. Si l’humour défie, « c’est aussi une forme de déni, de protection parce qu’il permet de refuser d’affronter certaines choses ».
Celui qui fut longtemps ucclois se dit « très, très client de ses copains », Guillermo Guiz, Aymeric Lompret et autres Ricky Gervais, et assidu des spectacles comiques comme celui de Stéphane Guillon. « Quand on voit les autres travailler et être drôles, ça donne envie de travailler et d’être drôle. C’est motivant. »
On ne plaisante pas avec l’humour
Si les humoristes belges ont autant la cote en France, Vizorek l’explique par le fait que les Français, enrobés dans leur panache, n’acceptaient pas facilement la critique et ont demandé à quelqu’un d’autre d’avoir un avis sur eux. Quelques uns d’autres, en fait : ceux qui leur ressemblent le plus, les Belges. « Belge, j’ai l’impression que ça enjolive toujours un peu le mot humoriste, c’est bien vu, surtout aujourd’hui ! » L’humeur noire-jaune-rouge, décalée, décomplexée. « L’humour français n’est pas forcément différent, mais comme nous sommes plus enclins à l’autodérision et qu’on a facilement tendance à se présenter avec humilité comme des idiots, notre humour est un poil différent. »
Chroniqueur quotidien à France Inter, il s’inspire de l’actualité, des faits de société, des façons de vivre, teintée parfois de satire, sa façon de traiter les mauvaises nouvelles. « Si mon billet n’est pas drôle, c’est ma faute. Même si je fais tout pour que ça n’arrive pas, je me dis toujours que ce n’est pas grave si j’en rate une, il y en aura une autre demain. » S’il bosse avec des co-auteurs, c’est lui qui fixe la thématique et l’angle. « Une fois que j’ai l’idée, ils sont très créatifs, c’est chouette de travailler comme ça en équipe. » Le spectacle, c’est 100 % de son cru.
L’humour, un art d’exister
Le vide ne convient pas à Alex Vizorek. Il réfléchit, il remplit, sans problème, mais cherche quand même une technique pour se ressourcer. Il avoue franco être assez égocentrique : « Je pense que si chacun pensait à soi, personne ne serait oublié. Mais après, si les gens me le demandent gentiment, je veux bien les aider. » Bien qu’il estime prétentieux de croire qu’on peut aider quelqu’un – « On peut le soulager, mais aider, je trouve que c’est un grand mot. » Quand les gens sont talentueux, il aime leur dire, s’arranger pour qu’ils soient invités, mettre leur talent en avant. « C’est la seule façon dont j’aide les gens », et il précise dans la foulée que le principe de l’amitié, c’est d’être complémentaire !
La gentillesse lui plaît, comme celle d’un Gaspard Ulliel, en revanche le sport lui semble totalement inaccessible. La mort, l’humoriste s’en fiche un peu, la souffrance il en a peur. « J’ai bien pris soin de ne pas fabriquer des gens dont j’aurais la responsabilité, de type enfant. » Les mômes, il n’en veut pas et le dit facilement. Anosmique, il n’a pas d’odorat, mais en a pris les bons côtés, compense et s’en passe : « Il me reste quatre sens pour prendre la beauté du monde, le goût et le toucher des choses. » Il n’aime pas les regrets – « C’est fait, c’est perdu et on peut plus changer ». Et au rayon choix, au final, il en a fait surtout des bons. Comme il gère habilement le doute : « La gestion d’une carrière d’artiste, c’est essayer d’en avoir le moins possible et doser la cascade de doutes qui vous tombent en permanence dessus. »
Il ne réfléchit jamais trop, ne se demande pas si c’est bien ou pas bien. « Je me dis : ‘’’Est-ce que j’en ai envie ? Est-ce que ça amuse l’enfant que j’étais de se dire que l’adulte que je suis va accepter de faire telle ou telle connerie ?’’ » Ce que les gens vont penser ne l’influence pas – « C’est moi qui pense. Si je me sens ridicule, ça suffit à ne pas le faire. » Rire de tout ? « Plus c’est noir, plus c’est compliqué, plus il faut travailler pour qu’il y ait pas de doute sur ce que vous voulez dire, au troisième degré. » Rire même de la mort et surtout de l’orgasme (comme dans son nouveau spectacle), mais pas pendant : « J’aime bien dissocier le rire et l’orgasme. Laissons le rire à ceux qui en ont envie. »
À Uccle, comme chez sa grand-mère
Avant, il habitait, avenue Houzeau en face d’Uccle 1 et allait à l’école au Sablon. « Tant mieux, parce que si ma vie se limitait au passage piéton entre l’école et la maison, ça aurait été bien triste. » S’il n’a jamais tenu un stick de hockey en main, il fréquentait alors le Léo et le Racing – « Ces gens ont un sens de la fête plutôt agréable. Donc, j’arrivais à la fin des matchs pour boire les bières. » Maintenant encore, Alex Vizorek se sent chez lui à Uccle. « C’est comme si j’allais chez ma grand-mère, je suis toujours hyper content d’aller la visiter, mais franchement si j’y reste pas trop longtemps, ça me va aussi. » Sa fierté absolue est d’avoir joué au CCU tout au début. « Je remercie Carine Gol au passage. Alors échevine de la Culture, elle avait poussé à ma programmation alors que j’étais inconnu au bataillon. Après la sortie de ma tête à Édith Cavell, c’est mon deuxième grand souvenir Ucclois. »
Être sur scène, c’est tout ce qu’il préfère.
VIZOREK PLEIN LES OREILLES
En radio, sur France Inter : son billet d’humour dans la Matinale du 7/9, ses interventions dans Par Jupiter, qu’il anime avec Charline Vanhoenacker, et de Pastek, avec Tanguy Pastureau.
À la télé, sur France 2 : sa carte blanche, dans Télématin.
Sur scène, au CCU : vendredi 13 mai, avec Ad Vitam, un spectacle sur « la vie, la mort et l’orgasme, cette petite mort».