Réhabilitation 

Petit coup d’accélérateur pour le redéploiement de l’hippodrome de Boitsfort, situé en réalité à Uccle, avec le lancement jusqu’à fin décembre d’un « appel à manifestation d’intérêt », visant à accueillir de nouveaux occupants sur le site. Notamment dans les locaux situés sous la grande tribune et le Village des Paris rénovés. Profils privilégiés : des acteurs de l’économie circulaire et raisonnée ou porteurs d’un projet sociétal. De quoi relancer une dynamique qui tourne au ralenti depuis plusieurs années ? 

Un écrin de nature (c) DR

Comme un rêve qui aurait viré au cauchemar ! Du moins pour les promoteurs du projet de transformation de l’Hippodrome de Boitsfort, à l’abandon pendant trois décennies et dont les Ucclois savent peu que les 32 ha sont à plus de 95 % situés sur le territoire de leur commune. « Les promoteurs », c’est d’abord la société Drohme, constituée par VO-Group (événements et communication) allié à des investisseurs privés et choisie en 2014 par le gouvernement régional pour redonner vie au site au profit des Bruxellois. 

Un magnifique challenge, qui s’est très vite heurté à la vindicte de riverains jaloux de leur tranquillité et de défenseurs de la nature soucieux de celle de la forêt de Soignes, qui ont multiplié les démarches pour empêcher toute velléité de développement.  

Permis d’urbanisme attaqués les uns après les autres, recours à répétition introduits jusqu’au Conseil d’État (certains sont toujours pendants), suspension forcée des travaux des impétrants visant à acheminer l’eau, le gaz et l’électricité et à évacuer les eaux usées des bâtiments jouxtant l’ancienne piste hippique devenue lieu de promenade… Rien n’a été épargné au projet depuis son arrivée. Ses actionnaires n’ont pourtant pas baissé les bras et espèrent inlassablement redonner du lustre à ce formidable écrin dans l’esprit qui a toujours été le leur, en phase avec les souhaits de la Région – mais aussi de la commune d’Uccle, dont le collège et le bourgmestre soutiennent ardemment le redéploiement dans une optique la plus inclusive possible. 

« Nous nous sommes toujours inscrits dans le respect de l’appel d’offre, affirme David Reculez, qui a repris la direction opérationnelle du projet pour Drohme depuis quelques mois. Celui-ci donnait la totalité du site en concession pour 15 ans à un partenaire privé, chargé d’y déployer de façon assez ouverte des activités de détente, sportives, culturelles, éducatives et en lien avec la nature, avec une orientation familiale ». La Société d’Aménagement Urbain (SAU, publique) se voyait pour sa part confier le soin de rénover les 27 bâtiments classés, dont la grande et la petite tribune, la maison jadis dédiée au pesage des jockeys et de leur selle, les écuries ou les arcades des halles des paris. Sans oublier la remise en état du parking, qui ressemble plus à un champ de bosses qu’à un champ de course. 

La petite tribune (c) DR

Éducation à la nature 

Malgré le travail de sape des opposants au projet, Drohme est parvenu à réhabiliter et exploiter un golf de 9 trous (homologué par la Fédération nationale) et son clubhouse à l’intérieur des anneaux de la piste hippique, à organiser de nombreux événements populaires en extérieur et privés en intérieur, notamment dans la loge royale des tribunes, à confier à un partenaire l’exploitation d’un restaurant dans le superbe bâtiment du pesage – malheureusement fermé l’hiver faute de fréquentation suffisante – et à maintenir l’organisation de la Terrasse de l’Hippodrome en été. Récemment rebaptisé Terrasse O2, ce « cocktail bar à manger » éphémère existait bien avant l’arrivée de Drohme qui se borne à lui louer l’espace, mais son caractère controversé car élitiste n’est sans doute pas étranger à l’allergie aux activités du site développée par certains voisins… Une rumeur prétend même que le bourgmestre Ecolo de Boitsfort, Olivier Deleuze, s’y est vu refuser l’entrée car « pas assez bien habillé » au goût des portiers, mais nous n’avons pas pu recouper l’info. 

Quoi qu’il en soit, on est loin des ambitions de départ qui prévoyaient entre autres l’installation d’un parcours d’accrobranche, d’une plaine de jeux pour enfants, d’un musée de la forêt, d’un « belvédère des cimes » offrant une vue à 360° sur la ville et la Forêt de Soignes, classée zone Natura 2000 aux abords de l’hippodrome, d’un second restaurant dans la maison des gardes jouxtant la chaussée et l’accueil de différents acteurs extérieurs proposant toutes sortes d’activités au grand public. Et faute d’accès facile, de parking digne de ce nom et d’animations en suffisance, on est loin aussi de ce que pourrait être la fréquentation d’une telle porte d’entrée sur la nature environnante. 

« Contrairement à ce que certains ont pu craindre ou prétendre, il n’a jamais été question de développer un ’’parc d’attraction’’ mais un ensemble d’activités ludiques, sportives et pédagogiques dans un cadre naturel d’exception dont l’accès reste librement ouvert à tous les citoyens, fut-ce pour se promener », martèlent les promoteurs du projet. Partie remise ? Les lignes semblent en train de bouger. Freiné dans ses élans alors que le sablier de la concession s’écoule inexorablement, Drohme a obtenu du gouvernement bruxellois une remise à plat du dossier et une révision du projet basée sur une nouvelle répartition des rôles, avec l’arrivée d’un nouvel acteur public de poids : Bruxelles Environnement rejoint le tour de table pour reprendre à son compte la gestion des espaces verts, le développement de l’éducation à la nature, les demandes de permis et les investissements qui vont avec.  

Un village qui prend forme 

Concrètement, explique-t-on au cabinet du ministre-président bruxellois, la SAU reste emphytéote des 32 ha du site et responsable de la coordination globale de son développement, tandis que son exploitation est désormais partagée à parts quasiment égales entre Bruxelles Environnement (15,9 ha) et Drohme (16,4 ha). Ce dernier obtient une rallonge à son contrat de concession pour récupérer les années perdues et les projets évoqués plus haut sont confirmés. Aux yeux de Rudi Vervoort, « le rôle accru des institutions publiques permet de garantir la préservation du milieu naturel du site » et d’en relancer le développement « pour répondre au besoin d’espaces verts accessibles à tous, indispensable en cette période particulière (NDLR : celle de la Covid) mais également vital au bien-être du public en temps normal ». 


Des photophores et du rock. (c) Les artisans ciriers

A charge pour le nouvel arrivant de construire la plaine de jeux régionale, la Maison de la Forêt, le belvédère qui culminera à une trentaine de mètres, d’aménager la piste en parc linéaire, de gérer les abords du site et de mener des actions pédagogiques de sensibilisation à la nature. La SAU poursuivra la rénovation des bâtiments – elle termine actuellement celle des deux entrées du site, de la maison des gardes et des halles des paris –, achèvera les travaux d’impétrants et réaménagera le parking, indispensable au déploiement du site. Quant à Drohme, il reste « chargé du développement, de la gestion, de l’animation et de l’exploitation du parcours des cimes (NDLR : l’accrobranche), du golf, d’un mini-golf, du Village des Paris, de la brasserie du Pesage, ainsi que de l’exploitation du parking principal. » Le parcours actuel du golf sera adapté pour laisser la place à la plaine de jeux dès que les permis d’urbanisme lui auront été accordés – des riverains qui ne veulent rien entendre sont toujours en embuscade. 

En attendant, la priorité des concessionnaires est de développer le Village des Paris, « un espace plus grand que la place Flagey », dit David Reculez qui inclut notamment les tribunes, sous lesquelles plusieurs locaux peuvent être aménagés. Depuis cet été, différents opérateurs « alignés sur les valeurs du projet » s’y sont installés (lire l’encadré), dont les activités rencontrent un réel succès. Ils conjuguent volontiers leurs talents pour proposer notamment des stages combinés pendant les vacances scolaires, y compris avec le golf pour ceux qui veulent s’y initier. Et depuis que les confinements successifs ont fermé les salles de sport, plusieurs coaches sportifs se sont emparé des plateformes extérieures de la grande tribune pour s’entraîner et proposer des cours en plein air à leurs élèves. Une initiative que Drohme voudrait fédérer pour la pérenniser et permettre à tous les riverains d’en bénéficier. 

Appel à projets 

C’est dans cet esprit de partage, de synergies et de convivialité que les promoteurs du site voudraient accueillir d’autres acteurs pour occuper les espaces toujours disponibles. Un « appel à manifestation d’intérêt » a été lancé début novembre et les porteurs de projets sont invités à déposer leur candidature d’ici la fin décembre. Un jury professionnel indépendant les départagera ensuite. « Étant donné le caractère transitoire de la situation, dans l’attente des permis qui permettront notamment de boucler les travaux de rénovation et d’alimentation du site, nous ne pouvons proposer que des baux d’occupation précaire », précise David Reculez. 

« L’objectif est de préfigurer ce à quoi pourra ressembler le Village des Paris quand le projet pourra enfin être durablement déployé, de faciliter la conservation des bâtiments et de sécuriser les lieux. » Les activités proposées doivent être en lien avec l’un des cinq pôles constitutifs du parc : éducatif, sportif, culturel, détente et nature. Cinq locaux sont actuellement disponibles pour une occupation permanente et deux pour l’organisation d’événements temporaires. Mais attention : s’ils ne manquent pas de cachet, ils sont loués en l’état. Murs et plafonds sont à nu, il n’y a ni sanitaires dignes de ce nom, ni eau courante ni chauffage pour le moment. Seulement l’électricité, qui permet les chauffages d’appoint. C’est ce qu’expérimentent les locataires déjà présents et tous en sont manifestement ravis, tout comme leurs élèves que nous avons pu rencontrer. 

Vous rêvez d’installer vos activités dans l’écrin de nature de l’ancien hippodrome d’Uccle-Boitsfort ? Décrivez votre projet sur www.drohme.be/fr/appel-a-manifestation-dinteret-village-des-paris/ 

Les occupants actuels 

Outre la Brasserie du Pesage, fermée l’hiver, les premiers occupants permanents du Village des Paris sont : 

Le Ceramic Studio, un espace de création entièrement dédié à la céramique, offrant cours et ateliers pour tous les âges animés par des céramistes de renom. www.ceramicstudio.be 

La Brussels Rock School, qui organise des stages, cours, ateliers et team-building pour adultes et enfants, qu’ils soient musiciens en herbe ou confirmés. www.brusselsrockschool.com 

Vanelo Concept, qui met vélos et triporteurs adaptés à la disposition des personnes à mobilité réduite, pour des balades en solo ou accompagnées. 

 www.vanelo.eu 

Les Artisans Ciriers Bruxellois, créateurs d’ambiances lumineuses et de photophores artisanaux en cire, qui viennent d’arriver et animent également des cours, stages et ateliers.  

www.lesartisansciriersbruxellois.be 

L’atelier de peinture de Dolores Borbon, artiste qui « explore les limites entre l’art figuratif et l’art abstrait »,  sur bois, papiers, cartons et cuir (sacs à main). 

www.dolores-bordon.be  

Marché de Noël les 11&12 décembre 

A l’initiative de certains occupants actuel, dont Carole Luel, de Ceramic Studio, un petit marché de Noël prendra place dans le Village des Paris le week-end des 11 & 12 décembre. Au programme : échoppes de produits artisanaux, créations artistiques, ateliers ouverts au publics et démonstrations notamment musicales. Dans le respect des règles Covid, cela va de soi. Des espaces seront également mis gracieusement à disposition d’exposants extérieurs. Intéressés ? Contactez