CUEILLETTE

Uccle compte 607 arbres remarquables, reconnus par la Direction des Monuments et Sites. Et voilà que la commune se lance dans un projet social écologique : replanter dans l’espace public des arbres fruitiers et étudier leur usage comme biens communs.

« …Ils fleurissent, parfument et nous nourrissent ! » Ils peuplent la terre depuis 370 millions d’années et sont 3 000 milliards. Nous sommes 7,5 milliards, apparus il y a 200 000 ans. Si l’on sait qu’un arbre est un écosystèm à lui tout seul et un précieux allié face aux changements climatiques, on reconnaît maintenant aussi son intelligence. On sait ainsi que les arbres communiquent entre eux par les airs et par le sol pour se nourrir ou se défendre, qu’ils envoient des signaux d’alerte à leurs congénères grâce à des courants électriques ou des substances chimiques, qu’ils s’échangent aussi des minéraux, de l’eau, de l’azote, du phosphore. Ils ressentent le monde extérieur, ils se situent dans l’espace, ils délimitent le soi et le non-soi.

Grenades

Et, cerise sur le gâteau, ils fleurissent, parfument et nous nourrissent!

S’il y a bien quelques pommiers et des noyers dans le parc du Jardin du Chat et des cerisiers au plateau Avijl, les arbres fruitiers en ville restent rares. « Or, la liste des services écosystémiques discrètement mais efficacement rendus par ces alliés feuillus est longue », détaille Simon De Muynck, coordinateur de projets de recherche-action au Centre d’écologie urbaine, une ASBL qui a pour objectif d’augmenter la résilience de Bruxelles en misant notamment sur les innovations sociales et la participation citoyenne : « Ils prennent très peu de place et offrent une production assez intensive, ils constituent une source de nourriture pour les oiseaux et les pollinisateurs, ils sont très peu sensibles aux polluants, ils contribuent à faciliter l’infiltration des eaux de pluie dans les sols et offrent de l’ombre et des îlots de fraîcheur notamment en période de canicule… »

LE FRUIT D’UNE CO-CRÉATION

Financé par Innoviris, le projet ARBRES (pour Arboriculture Régionale Bruxelloise pour une Résilience Écosystémique et Solidaire) est coordonné par le Centre d’écologie urbaine et mobilise divers partenaires : l’ASBL Velt, Bruxelles Environnement, Forest et Uccle.

ARBRES vise à explorer les conditions socio-écologiques d’implantation de l’arbre fruitier comestible à Bruxelles et à comprendre comment celui-ci peut participer à la résilience du système alimentaire et à une série de services écosystémiques.

Le projet, commencé en mars dernier, durera trois ans, assorti d’une enveloppe budgétaire de 1,1 million d’euros. Le processus de ce projet social écologique intégrera des étapes de cosélection, coplantation, cogestion, corécolte et codistribution des arbres d’abord et des fruits ensuite.

La recherche participative est une méthodologie de travail qui va plus loin que la simple consultation. Une enveloppe est d’ailleurs prévue pour défrayer les citoyens co- chercheurs. « Il s’agit vraiment de recherches ancrées dans Le réel », ajoute Simon De Muynck. « Nous aurons deux groupes de travail : à Uccle, où une praticienne chercheuse a été engagée pour mener à bien cette mission, on s’intéressera à la gouvernance et à l’organisation des citoyens autour des arbres fruitiers, tandis que Forest travaillera davantage sur leur diversité fonctionnelle:

9 MILLIONS DE KM2

C’est la surface terrestre pouvant être reboisée qui piègerait les deux tiers du carbone émis depuis la révolution industrielle sans empiéter sur les activités humaines. Comment planter, où et quels arbres fruitiers adaptés au changement climatique. Les traits fonctionnels des arbres devront répondre aux enjeux qui seront déterminés par les citoyens et les responsables d’espaces verts (espèces adaptées à la sécheresse, espèces à haut potentiel nutritif, espèce résistante aux pluies abondantes etc.). »

KIWIS, KAKIS ET AKÉBIES UCCLOIS

Fruits de l´akébie

Le coordinateur de projets précise que « l’enjeu est la mixité. Si on s’autorisera à explorer les espèces exotiques et sauvages, on ira aussi chercher des variétés anciennes et certaines espèces indigènes qui sont très rustiques et très résistantes. Mais en tous cas, on bannira les espèces invasives. Et ce qui est sûr, c’est qu’on ne plantera pas de la Pink Lady (sourires). » Dès qu’on crée des conditions favorables, la rapidité d’apparition de la biodiversité est étonnante. Toutes les espèces s’adaptent, il faut leur laisser le temps. Reconnecter les citoyens à la nature nécessite de la part des participants une véritable implication, fortement consommatrice en énergie humaine.

Uccle, dont l’intention est de déminéraliser ses sols, mettra à disposition des espaces verts pour réaliser des recherches et expérimentations dans les parcs, squares, terrains en friches et, sans doute aussi dans certaines rues. Bien sûr, les contraintes urbanistiques seront largement prises en considération, comme la présence de véhicules en stationnement, la hauteur maximale des arbres ou peut-être aussi la volonté d’éviter certains fruits qui tachent. À chaque fois, l’objectif sera de trouver les essences qui correspondent le mieux au lieu, sur base des besoins exprimés par les habitants, riverains et responsables espaces verts.

De son côté, Camille Tauvel, cochercheuse du projet Co- Create ARBRES pour l’administration communale d’Uccle, explique que « pour l’instant, l’équipe du consortium fait un état des lieux de ce qui existe en termes de gouvernance et de pratiques existantes autour des arbres fruitiers. Nous analyserons aussi les freins psychologiques : pourquoi les gens ne cueillent pas les fruits à disposition dans les rues par exemple. Nous aurons les premiers résultats d’ici la fin de l’année et entamerons la corecherche dans la foulée. »

Récolte de citrons

29/07/21, LE JOUR DU DÉPASSEMENT

L’humanité utilise chaque année environ 74 % de ressources supplémentaires par rapport à ce que les écosystèmes peuvent régénérer,soit 1,7 fois la Terre, d’après le Global Footprint Network. Mais, le jour du dépassement a bel et bien permis de sensibiliser le public à l’impact croissant des activités humaines sur la biosphère et à l’existence de limites planétaires.