Que faire pour se sentir bien dans un monde en pleine mutation ? Cultiver le lien amical et social, plonger dans la spiritualité, se remplir d’émotions positives, jouir du moment présent, privilégier les plaisirs des choses simples, cultiver le soin de soi, miser sur l’engagement. Ce sont les recettes que nous livrent onze Ucclois.
Longtemps on a cru aux lendemains qui chantent. Maintenant, on craint les menaces planétaires diverses et variées, avec, de surcroît, une perte de confiance dans les institutions. Les cas d’anxiété auraient ainsi augmenté de 26 % dans le monde depuis la pandémie et la santé mentale est une préoccupation majeure pour l’OMS. Sans doute est-ce ce contexte de manque de confiance dans la globalité du monde qui incite à se mettre plus à l’écoute de soi-même. Pas en mode narcissique, parce que (grâce peut-être à l’écoanxiété ?) on ne pense plus seulement qu’à soi, mais à la planète entière. Tout en cherchant un bien-être qui peut revêtir différentes formes.
Spirituel
Ilios Kotsou et Caroline Lesire étaient un peu des précurseurs quand ils ont créé tleur association dédiée à la pleine conscience, il y a quinze ans. « Emergences est notre premier enfant, confie Caroline. Nous voulions améliorer ce qui se passe dans le monde en commençant avec l’outil qu’on a tous sous la main : nous-mêmes ! » Alors qu’Ilios Kotsou, docteur en psychologie, souligne une nouvelle dégradation mentale, il remarque que « lorsque c’est trop difficile, on a tendance à se couper de ses émotions. En méditant, on réapprend à écouter des maux qui nous alertent, qui ne sont pas alignés par rapport à nos valeurs. La vie nous pousse à être dans le faire. Ne plus chercher à avoir autre chose que ce qu’on a. » Alors avec leur équipe, le couple forme, informe, performe la méditation « pour soi, pour les autres, pour la planète ». Cours, ateliers, conférences dont les journées Emergences, publications, livres, et le dernier bébé, l’application de méditation Prezen.
www.emergences.org
Lui aussi médite. Maxime Dahan / Sudama, prof de hatha yoga, a transformé la maison de ses grands-parents en Ashram. « Tout est mouvement (le temps qui passe, le cycle de la vie, les saisons, etc). Tout est là pour changer. Alors, commençons par accepter ces changements en les observant sans jugement, c’est un des enseignements du moment présent. » Pour Max, le bien-être passe par le corps : l’accepter tel qu’il est, pratiquer des activités physiques adaptées et bien le nourrir. « Et prendre soin de son état psycho-émotionnel : quand on est dans l’être, on apprend à s’écouter en exprimant ses besoins, tout en écoutant ceux des autres. Le bien-être c’est la liberté, l’acceptation et le lâcher-prise. C’est le chemin du cœur. »
Psychologique
On consulte Bernard Rozen, psychothérapeute, pour sa pratique de la thérapie brève. « Le bien-être en 2023 pourrait découler de la recherche de l’estime de soi optimale en chérissant son moi authentique qui possède deux caractéristiques principales : nous vivons avec lui tout au long de notre vie et il est le seul ami dont nous sommes certains qu’il ne nous trahira jamais. » Il explique que le manque d’estime de soi incite à la chercher dans le regard et le jugement des autres en faisant tout pour plaire. « Et lorsque l’on fait tout pour plaire, on trahit celle/celui que l’on est vraiment, avec pour conséquence de déplaire à soi-même et par interactions de déplaire aux autres, car nous sommes des êtres miroirs. » Son conseil ? « Prenez rendez-vous chaque jour avec votre moi, dans un endroit où vous ne serez pas dérangé(e) et à l’heure qui vous convient, pour imaginer une multitude de façons d’être plus aimable avec lui que vous ne l’avez jamais été. »
Émotionnel
Si la créatrice d’accessoires de mode Olivia Hainaut mise sur la détox digitale, occasionnelle, elle estime qu’en revanche il faut savoir vivre dans un monde qui évolue, « certes trop vite », sans oublier les choses simples : vivre ici et maintenant, en accord avec soi-même, et profiter le plus possible de la vie et des gens qu’on aime, en se connectant le plus souvent possible à la nature. « Et se mettre dans de bonnes énergies ! Je crois de plus en plus à ce que l’humain est capable de réaliser s’il se met dans certaines conditions de pensée. » Et pour elle, il s’agit de créer plus encore « pour toujours éveiller et émerveiller les gens ».
En lien
La bière Plateau Avijl et l’Uccle Centre, c’est l’initiative de Greg Malcause et ses Bières de Quartier. Son crédo : comme personne ne sait de quoi demain sera fait, autant apprendre à apprécier ce qu’on a aujourd’hui. « Peut-être qu’avec tout ce qu’il se passe autour de nous, la notion de bien-être va plus précisément se limiter à la notion d’être ? Ou en tout cas, éviter les couches superflues de sensation de confort ou les recherches insatiables de la couche d’après dans laquelle on sera mieux. » Renforcer ou ne fût-ce que connaître son socle et ses racines. « Si nos journées nous ballottent de changements en bouleversements, il semble crucial de savoir vers qui/quoi se tourner pour se restabiliser et redémarrer sereinement. Un toit, des amis, de la famille, une activité… Ou peut-être simplement son quartier? »
« Je crois que le bien-être est fortement lié aux moments que je passe avec des proches, dans la nature ou parfois quand je suis seule », ditCécile Gilquin, entrepreneuse de jardin. « S’éloigner de ce qui remplit matériellement parlant et qui ne dure pas, et profiter de petits moments gratuits : une discussion avec un.e ami.e, une balade en forêt dans le silence, rester chez soi. Réussir à identifier ce qui crée de la tension en nous et réussir à s’en extraire quelques minutes, ou quelques heures, en faisant quelque chose qui fait du bien. » Ou en ne faisant rien d’ailleurs : méditer, rester allongé.e, marcher… « Ça ne veut pas dire que l’on évite toutes problématiques, la positivité toxique on connaît… Juste savoir voir ou créer ces moments de grâce. C’est comme le bonheur : on sait qu’il existe grâce aux périodes plus difficiles. Comme après une forte peine vient ce calme appréciable. »
Physique
Emmanuelle du Charlat, naturopathe, note une compréhension plus globale du bien-être : les gens sont mieux informés, interrogent, font avancer les process. « Même s’il est parfois difficile de rester aligné quand le monde bouge, il faut pouvoir s’adapter, se réinventer, s’imaginer demain, être assez fort, physiquement et mentalement, pour traverser la vie. Parler de bien-être pour certains sera déjà de pouvoir se chauffer. » Être régulier et attentif à son assiette, à ses besoins, à ses envies aussi. « Des notions très personnelles et individuelles. Chacun d’entre nous trouve son équilibre dans un dosage différent de plusieurs paramètres, eux-mêmes multiples. » Être à son écoute, savoir s’accorder du temps, oser faire encore des projets. « C’est dans les périodes de crise qu’il faut avoir l’audace de rêver. »
Camille van der Zee est esthéticienne. Avec Antoine, ils ont créé Intuition. Un salon et une mission : laisser la beauté s’exprimer pleinement en étant en parfait accord avec soi-même, la planète et autrui, parce qu’il n’y a aucune raison de le faire autrement. « Être encore un peu plus à l’écoute de son corps, des tensions et douleurs éventuelles, de notre peau qui parle beaucoup plus que ce que l’on peut imaginer. Le corps reflète notre état interne et, quand on en prend soin, de manière magique, on se sent en harmonie à l’intérieur ! » Pour Camille, un seul mot : « Ralentir, qui se traduit pour moi par ’’mettre plus de conscience dans nos actions, être plus présent aux moments de partage, se recentrer sur l’essentiel, ne pas se mettre de pression pour des choses faussement importantes’’. » Prendre un moment hors du temps, rien que pour soi.
Parce que le vêtement est la première chose qu’on donne à voir aux autres, Delphine Hertogs, styliste-habilleuse, art-thérapeute et clinicienne en « vêtothérapie » à La Ramée, rhabille le moral des femmes, révèle leur personnalité par le vêtement, la couleur, la matière. « Mon approche ludique leur permet d’arriver à être en adéquation avec qui elles sont vraiment. » Un accompagnement qui va bien au-delà du relooking, plutôt en mode microchirurgie émotionnelle. « Pour se sentir bien dans sa peau, il faut être proche de soi. C’est ça le bien-être. «
Déconnecté
C’est pendant le temps long du confinement, suspendu comme un arrêt sur image, que la photographe Fabienne Rideti expérimente la paix intérieure et la force que l’on peut ressentir lorsque l’on plonge profondément en soi « C’est dans nos têtes qu’il fallait aller chercher la liberté, à l’intérieur de nous-mêmes. » Cette prise de conscience nourrit sa dernière série, exposée à Maastricht jusqu’au 29 janvier : de la contraction à l’évasion interne, de l’accélération brutale aux instants suspendus. Alors, elle cultive ce nouvel équilibre émergeant d’une nouvelle forme de chaos. « Pour moi, c’est cela le bien être : des moments où l’on se déconnecte, loin de toute frénésie, pour se recentrer sur soi et ceux qu’on aime, sans attente. »
Futur
Aux enfants, Dominique Verlinden, directeur de l’école communale du centre, souhaite d’être accueillis par « des professionnels porteurs de valeurs telles que l’humanité, la bienveillance, l’empathie et l’engagement dans une école chaleureuse, ambitieuse pour chacun, dynamique, créative et ouverte sur le monde. Qu’ils y rencontrent des camarades avec lesquels nouer des relations joyeuses, sereines et vertueuses ». Grandir et s’épanouir dans un cadre alliant créativité, rigueur et plaisir, pour « qu’ils deviennent des citoyens heureux et engagés, capables de relever les innombrables défis du monde de demain ».
2023 sera-t-elle l’année du bien-être ?