La Compagnie Gazon·Nève est issue de la rencontre de Jessica Gazon et Thibaut Nève. Deux mondes. Que tout pourrait opposer.

Contradictoires et parallèles. Complémentaires et paradoxaux. Gémeaux et balance.

Un joyeux accident. Un accident joyeux.

Jessica Gazon nous parle d’ « En finir avec Eddy Bellegueule », spectacle présenté au Centre culturel d’Uccle le 20 octobre prochain.

« Bienvenue chez les Cht’is », façon Ken Loach, la cruauté et la tendresse en plus

Basée sur le roman d’Édouard Louis, le surdoué de l’écriture autobiographique, cette création dresse le portrait d’un ado considéré comme différent. Exclu, harcelé et violenté, Eddy Bellegueule grandit dans un monde où les pères renforcent leur « virilité » par leurs fils, où les garçons doivent rejeter l’école, être « un dur », travailler à l’usine ou se retrouver au chômage, puis boire pour oublier, et surtout détester les « pédés ». Et Eddy est un « pédé ».

Récit du coming-out à la fois drôle et violent d’un transfuge de classe, Eddy Bellegueule est une version moderne du vilain petit canard.

TU SERAS UN HOMME …

D’où vous est venue l’idée de mettre en scène le livre à succès d’Édouard Louis En finir avec Eddy Bellegueule ?

« Tout a commencé par une espèce de coïncidence : quelques mois avant l’invitation des membres du Collectif La Bécane, Thibaut Nève, mon partenaire de compagnie et dramaturge du projet, m’a mis ce roman entre les mains en me disant « ça, c’est pour toi ! ». Et en effet, je n’avais jamais lu quelque chose qui me parlait autant, avec tellement d’humour et d’acidité, sur le rapport à la domination, à l’exclusion, à la précarité et aux grands oubliés, thèmes qui m’intéressent depuis toujours. »

Dans la pièce, les tableaux éloquents, violents, drôles ou humiliants s’enchaînent avec une vitalité phénoménale, le tout sur fond de tubes des années 90…

Les créations sonores de Ségolène Neyroud et les tubes des années 90 jouent ici le rôle d’un baume sur le mal-être du narrateur encore prisonnier d’un monde brutal, où « les Arabes » et les homosexuels servent de paratonnerres, où la violence et la pauvreté sociale et intellectuelle d’une humanité méprisée se répètent dans des cycles infernaux. Et où malgré tout, j’en suis persuadée, l’amour ou l’honneur existent, même s’ils prennent des formes parfois surprenantes… »

Le bonheur, malgré tout

Justement, de quelle manière avez-vous réussi à retourner les clichés attachés à un milieu sans être misérabiliste ?

« En m’inspirant des autres livres d’Édouard Louis (Qui a tué mon père, Combats et Métamorphoses d’une femme), on y découvre la sensibilité, l’amour et les regrets malgré les meurtrissures de l’enfance … J’ai essayé d’injecter tout ceci dans la pièce, tout en restant implacable quant à l’analyse politique du contexte : une grande précarité qui puise aux racines de l’injustice sociale et du déterminisme. »

Les comédien(ne)s, qu’elles ou qu’ils soient filles ou garçon, jouent à tour de rôle le personnage d’Eddy Bellegueule, pourquoi ce choix?

La représentation voulue dégenrée de la pièce vient souligner l’universalité des tourments d’Eddy et celle du ressenti de chacun. Il n’y a jamais deux spectateurs-rices qui, ayant vu la même pièce, y auront vu la même chose. La différence est en chacun de nous. Mais, ce qu’il m’importe d’apporter avec ce spectacle c’est, au mieux, la force à ceux qui le verront de se dire « oui, s’en sortir, c’est possible ! », au pire, de déplacer leur point de vue vers quelque chose de plus lumineux.»

Cela s’appelle l’espoir.

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