Chaque mercredi au Parascolaire d’Uccle, une bande d’ados enfile des gants de boxe et se défoule, se renforce, se confie et apprend à se respecter avec Ibrahim Bah de l’asbl Team Wakanda Project. Parce que la boxe est un exutoire physique dont l’énergie incite à libérer la parole, parce que le respect, l’entraide et la motivation sont les bases de cette discipline, ce collectif de boxeurs s’est donné comme mission de sensibiliser les jeunes aux fléaux du harcèlement.
Une étude récente révèle qu’un jeune sur trois est impliqué dans des faits de harcèlement. Coups, attouchements, sifflements, injures, moqueries à l’école, au sport, dans la rue, dans les transports, au boulot et même entre potes, sur les réseaux sociaux et même en famille. Une violence qui se répète, se larve partout, parfois ostensible et criante de vérité, parfois sournoise avec des mots qui attaquent, des paroles quelques fois aussi blessantes que des actes, et, parce qu’ils restent, ces mots écrits qui font parfois plus de mal.
La boxe, c’est bien plus qu’un sport
Et puis, il y a les gestes qui aident et les mots qui peuvent sauver. C’est ce qu’expérimente la quinzaine d’ados filles et garçons au cours de boxe éducative du Parascolaire. « Certains voient la boxe comme un sport violent, mais pour nous c’est surtout un moyen de communication, d’expression, de libération », dit Ibrahim Bah, cofondateur de la Team Wakanda et de l’asbl TW Project. « C’est en nous entraînant chaque semaine avec notre collectif mixte de boxeurs amateurs, que nous avons pris conscience de l’impact hyper positif du groupe sur nos vies », poursuit Ibrahim. Parce que la boxe, c’est bien plus qu’un sport, ce sont surtout des valeurs d’échange, de communication et d’entraide.
La parole est d’or
« Bien sûr on leur apprend à se défendre, mais avant tout à se respecter et avoir les bons comportements. » D’ailleurs, dans le petit groupe WhatsApp que les élèves et leur coach ont aussitôt formé, déjà ils surveillent leur langage et chassent les gros mots. A Ibrahim, ils se confient, lui expliquent leurs problèmes, confiants. Et, Ibrahim insiste : si quelqu’un se fait harceler, il ne doit pas se taire, il doit oser en parler, au professeur, à ses parents. « Les jeunes ne doivent pas se sentir seuls avec ce truc horrible. Nous leur apprenons les petites techniques de base de la boxe, mais le plus important lors de ces séances, c’est de développer la confiance, en eux d’abord. » Et, si la boxe améliore la posture, développe la force, l’endurance et la flexibilité, on y apprend aussi à contrôler le mental et la communication non verbale susceptible de dissuader l’agresseur.
Même plus peur
Chaque mercredi, ils répètent les gauche/droite droits dans les yeux de leur binôme, reprennent les droites/gauches en sautillant avec le partenaire suivant, et s’entraînent surtout à avoir un mental solide pour être capables d’avoir la bonne attitude s’ils se sentent menacés. Qu’ils puissent, en cas de problème, regarder l’agresseur droit dans les yeux et lui dire « je n’ai pas envie de me battre avec toi, mais je n’ai pas peur de toi. » C’est aussi une façon d’apprendre à connaître les autres et à se connaître soi-même. « Et à devenir pleinement eux-mêmes », conclut Ibrahim.
Mise au poing
Jâbir El Hichou, responsable pédagogique du Parascolaire, conscient que la boxe favorise la discipline, la concentration et la confiance, précise : « Il est important de noter que la boxe éducative ne doit pas être utilisée pour la violence ou la vengeance, mais plutôt comme un moyen de développer des compétences et des attitudes positives pour faire face aux situations de harcèlement. »
Témoignages
Julita, quinze ans, vient aux cours pour dégager son énergie. « A la base je croyais que c’était juste un groupe de boxe normal. Quand j’ai appris qu’il y avait aussi la lutte contre le harcèlement, franchement j’ai été super heureuse parce que j’ai été parfois harcelée quand j’étais plus petite. C’est bien qu’il y ait des gens qui essaient de lutter contre ça. »
Micha, 14 ans, aime se défouler. « On peut sortir toute la haine qu’on a en nous. La haine ? Comme tout le monde, je pense, On a tous un peu de rage en soi, non ? On peut tout taper. C’est cool, après on se sent super bien. »
Ilan, il dit que ça lui fait du bien « parce que si je suis énervé je peux un peu refouler, mais ici ça va vite faire ressortir les émotions. Donc après le cours, la plupart du temps on
est heureux, on parle, on est bien. Et je me suis aussi fait
des amis ici. »
Kelly, elle rit et avoue : « en cas d’agression, je pourrais peut-être me défendre même si à mon avis je choisirais plutôt la fuite, parce que taper un mec d’un mètre quatre-vingt c’est un peu compliqué. Mais si vraiment je dois utiliser ce que j’ai appris ici, je le ferai. Et je sais que je peux le faire. »
TW Project – Ibrahim Bah − 0485 65 21 87
Parascolaire d’Uccle − 02 605 15 20