Rentrée scolaire
Sept semaines de cours et deux semaines de congé en alternance, c’est le nouveau rythme scolaire des 900 000 élèves de maternelle, primaire et secondaire en Wallonie et à Bruxelles. Soit, deux semaines de vacances en moins l’été mais deux semaines de congé à la Toussaint et au Carnaval, dont une commune aux trois Régions, comme pour les vacances de Noël, et les quinze jours de Pâques reportés à début mai. Le nouveau modèle prévoit également la réduction des jours blancs, lorsque les professeurs corrigent les examens ou reçoivent les parents. Et, pour que les élèves puissent réellement décompresser pendant les deux semaines de congé, qu’aucun test ne soit organisé durant les cinq premiers jours de chaque rentrée.
L’objectif de la réforme, dans les cartons politiques depuis trente ans, vise à mieux répartir le temps d’étude et le temps de détente pour respecter le rythme des enfants. Pas besoin d’être spécialiste pour noter qu’en effet, début novembre et fin février, le moral des jeunes chute, la fatigue s’accumule, et la concentration faiblit. Pédagogues et chronobiologistes pointent également les grandes vacances, trop longues, qui déconnecteraient totalement les jeunes de leurs études. Ils estiment en outre qu’il leur faut une première semaine de congé pour se déshabituer des contraintes d’horaires avant de pouvoir se reposer et profiter totalement de leur temps libre la deuxième semaine.
Effets collatéraux
Quatre fois deux semaines sans école, en plus des vacances d’été, et sans concordance avec les deux autres Communautés (flamande et germanophone) ainsi qu’avec l’enseignement supérieur et de promotion sociale : les parents vont devoir s’adapter. Bonjour les casse-têtes des stages, vive les grands-parents retraités, terminés les camps en immersion en Flandre… « J’ai un enfant à l’école en français et l’autre en néerlandais. C’est la première fois que je songe à remettre ma grande en français », dit Elena.
Idem pour les professeurs qui travaillent en Communauté francophone et ont leurs enfants scolarisés en Flandre, et vice-versa. Et mises à jour forcée des agendas de garde partagée pour les familles de divorcés, « quand ce n’est pas au juge de trancher », confie Julie. Même la météo tracasse : « Les enfants vont devoir aller à l’école jusqu’au 7 juillet, alors qu’on est déjà dans les chaleurs à partir de mi-juin. Les bâtiments scolaires ne sont pas équipés de climatisations », souffle Alexandra.
Dominique Verlinden, directeur de l’École communale du Centre, ne nie pas les quelques écueils, comme les rythmes différents entre les Communautés, mais il estime que cette réforme est cohérente. Et courageuse, « parce qu’on connaît les résistances au changement et que les politiques ont suivi ce que les scientifiques mettaient en exergue ». Le nouveau modèle nécessite une réorganisation, mais pas davantage que les autres années, pense-t-il : « L’offre des structures extrascolaires va s’adapter, les garderies et le parascolaire d’Uccle sont dynamiques. Les longues vacances d’été étaient préjudiciables pour les enfants défavorisés ». Une mesure qu’il juge aussi profitable pour les adultes qui pourront mieux recharger leurs batteries. « Cela aura un impact sur l’absentéisme, tout au bénéfice des élèves », conclut le directeur.
Même enthousiasme pour Véronique, enseignante en 3e et 4e à Uccle depuis 1995 : « Dès le début, j’ai ressenti le besoin de réformer la répartition des congés. C’est difficile de remettre le pied à l’étrier après les longues vacances d’été car les enfants ont perdu une partie de leurs acquis. »
Officiellement positif
« La finalité de cette réforme, évidemment bénéfique pour les enfants, est enfin d’application, déclare pour sa part Carine Gol-Lescot, échevin de l’Enseignement. Maintenant il va falloir s’adapter et nous allons faire en sorte que cela fonctionne au mieux, comme pour chaque changement. » Concrètement ? « Les nouveaux rythmes vont impliquer pas mal de modifications d’horaires, en tous cas pour tous les animateurs de garderie et le personnel des écoles, dont nous avons dû modifier les contrats. Nous allons réorganiser la plaine de jeux, ouverte à tous en été, et les garderies pour les petits Ucclois. »
Ce que confirme Dominique Albert, du Service Éducation & Enseignement : « Nous offrirons toujours aux enfants des garderies pour toutes les périodes de vacances scolaires en adaptant notre offre aux nouvelles périodes. En été, il y aura toujours la plaine de jeux. » Le personnel sait qu’il va être amené à travailler différemment et qu’il bénéficiera des congés scolaires à tour de rôle. « L’un dans l’autre, ils ne vont pas travailler davantage. »
Notons qu’une réforme de l’Accueil Temps Libre est à l’agenda de la ministre francophone de la Petite enfance, Bénédicte Linard, qui prévoit notamment une augmentation du nombre de places d’accueil. Le gouvernement de Fédération Wallonie-Bruxelles (FWB) poursuit en outre les discussions avec les représentants des mouvements de jeunesse pour ouvrir de nouveaux lieux. Zélie, cheffe scout à la 111e Unité de guides et scouts d’Uccle confirme : « Je crains que ce ne soit encore plus compliqué de trouver des lieux, vu que tout le monde devra trouver au même moment ! De plus, le camp que nous organisions à Pâques est compromis car en mai tous les chefs sont en plein blocus. »
Stages et activités extrascolaires : comment on s’organise
Au passage, ne pas confondre les plaines de jeux telles que Sauvagère, Wolvendael ou Homborch qui sont en fait des aires de jeux. Le centre de vacances communal de Calevoet est ouvert à tous les enfants, Ucclois ou pas, moyennant des tarifs différents, uniquement pendant les grandes vacances. « Ici, les animateurs extérieurs prévoient des activités en partenariat avec les enfants, en fonction de la dynamique du groupe et de la météo », précise Julie Dupuis, coordinatrice pédagogique des garderies et des plaines de jeux communales.
Même son de cloche rassurant pour le parascolaire qui « étendra évidemment son offre au nouveau rythme scolaire dans les écoles francophones, rassure Valentine Delwart, échevine de la Jeunesse et du Parascolaire – Extrascolaire d’Uccle. Malheureusement, nous ne pourrons pas proposer des stages pour toutes les semaines de congé de l’enseignement néerlandophone, notamment à Pâques, car la plupart de nos moniteurs sont professeurs dans l’enseignement francophone. » Notons que les stages du parascolaire sont particulièrement bons marchés (moins de 100 euros pour un enfant ucclois, repas chaud compris). « Des dispositifs d’aide aux familles existent, via notamment le CPAS ou la FWB. Ceci dit, les semaines supplémentaires durant l’année sont partiellement compensées par le fait que les vacances d’été commencent une semaine plus tard et se terminent une semaine plus tôt », conclut l’échevine.
Le Val d’Uccle garde le même nombre de périodes pour les classes de neige mais à d’autres moments. Les quinze jours de Noël et une semaine à Carnaval seront réservés aux vacanciers. Le stage de ski qui se déroule traditionnellement à Pâques sera avancé à la deuxième semaine de Carnaval. « Parce que la finalité du Val d’Uccle, c’est d’accueillir les jeunes Ucclois », reprend Carine Gol-Lescot, également en charge de la Tutelle ASBL Le Val d’Uccle. « Mais cela impactera évidemment notre rentabilité, parce que l’un dans l’autre, on perd une semaine. »
Le privé plus dubitatif
Francophones et néerlandophones continueront à être les bienvenus chez nooby.tech ! « Nous sommes préparés à ce changement. Certains des coachs qui donnent cours et animent les stages de robotique parlent néerlandais. Nous n’aurons donc pas de problème à nous adapter aux deux rythmes. Nous sommes déjà en train de prévoir les stages et activités qui auront lieu pendant les prochaines vacances scolaires de Toussaint, Noël et Carnaval, avec deux semaines de stage à chaque fois », dit ainsi Monica Borges.
Par contre, une seule semaine de stage chez Super Lexi à la Toussaint et Pâques (début mai, en fait, donc), éventuellement deux au carnaval. Sylvie Mejblum, fondatrice : « Nous allons privilégier la qualité car s’engager pour deux semaines de stage d’affilée serait intense, et sans répit. » Elle rajoute que « le manque d’infrastructure disponible à moindre frais causera la perte des petits organismes de stages ».
Youplaboum proposera le même nombre de stages qu’auparavant, simplement disposés autrement, calqués sur le calendrier scolaire francophone. Laura Decrae précise : « Nos stages suivent une thématique et un projet précis différents chaque semaine. Les animateurs changent également. Cela permet une grande diversité dans le fond et la forme, ce qui en fait toute la richesse. Mais nous craignons qu’il soit plus compliqué de trouver des animateurs durant les semaines de congés scolaires ajoutées parce que nous recrutons beaucoup d’étudiants du supérieur. Nous nous inquiétons donc de perdre une partie de ce partenariat, indispensable et très ressourçant pour notre asbl. » À l’instar de Maxine, étudiante à l’Érasme Hogeschool et animatrice pendant ses vacances chez Youplaboum : « C’est encore un truc qui divise notre petit pays et sépare la Wallonie de la Flandre. »
182 jours d’école – 183 jours de congé : 11 semaines en commun sur les trois régions pour l’année 2022/2023
Ce changement de calendrier sera une nouvelle source de problèmes à gérer pour Colette Coenraets, directrice du centre de danse Choreart : « Quatre arrêts de quinze jours sur l’année scolaire risquent de perturber l’apprentissage et la motivation des élèves à cause d’un rythme trop souvent interrompu ! La différence de congés impactera également la fréquentation de nos stages : nous risquons d’avoir des classes incomplètes. Il nous faudra le gérer pédagogiquement et financièrement ». Et surtout, qu’en sera-t-il des stages d’été qui se donnent la première semaine de juillet et la dernière d’août depuis 35 ans ? « Nous espérons découvrir rapidement les bienfaits recherchés de cette mesure », conclut la danseuse.