Après avoir été graphiste pour des agences de pub, maquettiste chez Marie-Claire, Joëlle N. Jacques a fait quelques passages dans de grands laboratoires professionnels où elle a pu s’initier à la délicate chimie de la photographie argentique. Elle a beaucoup aimé l’ambiance presque ouatée des moments passés à scruter les bacs de révélateur et de fixateur, dans une obscurité soulignée par le rouge de la lumière inactinique. Projeter le négatif au travers de l’agrandisseur, voir apparaître dans le liquide le fantôme positif de l’image, en pousser le contraste en agitant la feuille de papier photo au bout d’une pince, arrêter son développement juste quand il faut, c’est une succession de gestes qui devient le rituel des nuits artificielles du labo. Des nuits américaines, diraient les cinéastes.  “Et c’est une grande part du plaisir de travailler en argentique, à tel point que, volontairement, j’ai continué dans cette voie-là plutôt que dans la photo digitale. Je ne le regrette pas.”

Elle n’est pas la seule, il semble que la passion un peu rétro de l’argentique connaisse un regain de faveur, un peu comme les disques vinyls qui ont fait un grand retour. Un bémol, il n’est pas toujours facile de se procurer les émulsions qu’on recherche pour nourrir de rouleaux son Leica, Nikon, Canon ou Fujifilm.

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Un graphisme géométrique

Pour passer de la chambre noire à la prise de vue, il a fallu à Joëlle le déclic d’une rencontre, celle d’Armyde Peigner qui, à l’Académie d’Ixelles, l’a définitivement convertie à la photo. Toujours noir et blanc, pour pouvoir bien sûr maîtriser seule toutes les étapes de l’image. Aujourd’hui, elle travaille à des projets de séries thématiques – les piscines, les grands escaliers, par exemple – qui offrent des visuels très graphiques, avec des lignes qui se croisent et des motifs qui se répètent. Les mois de vie suspendue du Covid-19 ne lui ont permis de réaliser qu’une infime partie de son programme mais lui ont offert par contre un autre sujet: l’invasion des gants chirurgicaux jetés, comme les masques, dans l’environnement. Elle a tiré des images fortes, répétitives, de ces mains à l’abandon. D’autres projets sont dans son pipe-line pour demain, comme des portraits sociaux de gens au charisme fort, ou une mise en images photographiques de l’univers du grand dessinateur de BD, Comès. Demain ne fait pas peur à Joëlle Jacques, elle a été commissaire de l’exposition “C’était mieux demain”au Musée Belvue. Mais ça, c’était hier. S.P.

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