ALESSANDRO FILIPPINI  


La vie est son paradis de tous les jours. Alors, Alessandro Filippini sculpte des mots, fait danser la lumière dans leurs creux, habille la poésie de vent. Il parle au ciel et compte sur les lumières pour réfléchir ses messages de joie sur deux ronds-points d’Uccle. 

Ses paroles chantent, comme elles le font toujours dans le sud. « Je suis très attaché à la musique et à cette  sonorité de la langue italienne» , sourit Alessandro Filippini, alors  
que devant l’Observatoire tourbillonnent dans le ciel ses mots d’inox. « RÊVER » d’un côté, de l’autre « NOTRE VIE ». « Mais notre vie, c’est quoi ? Je voudrais juste qu’on s’arrête un instant pour capter le bonheur qu’on a d’être simplement en vie, c’est important. Tout  l’esprit de mon travail est là. C’est le message que je voudrais faire passer et c’est pour ça que je préfère l’art public, qui touche tout le monde, de tous les âges, qu’on le voit ou pas. » 

La rue qui fait office de réseau social, en diffuseur de bonne humeur. « Les mots restent parfois comme l’écho dans le vide. Mais rien n’est rien. Nous sommes de merveilleux funambules sur l’ombre du silence.» Il semble qu’il existe dans le cerveau une zone tout à fait spécifique qu’on pourrait appeler la mémoire poétique et qui enregistre ce qui nous a charmés, ce qui nous a émus, ce qui donne à notre vie sa beauté, comme écrit Milan Kundera dans L’Insoutenable Légèreté de l’être
 


Un hymne à la vie, devant l’Observatoire (c) Cilou de Bruyn

Des mots magiques 
Enchanter la vie et galvaniser la poésie avec un mot, ou deux, même six sur la place Guy d’Arezzo. Chaque lettre est minutieusement polie pour qu’elle reflète la nature, les oiseaux, la lumière, capte le regard des passants vers le ciel de mots d’Alessandro. Des mots évocateurs, chacun réfléchis avec la plus grande concentration pour en sortir toute leur sève, tout leur pouvoir. Il pèse ses mots, Alessandro. Au gramme près, il les lime, les ajuste et leur colle une boule élégante en contrepoids pour qu’ils dansent, et immuablement défient le temps qui passe. « Je les mets en girouette pour qu’ils puissent tourner des années autour d’un axe, savamment étudié. » Il travaille l’inox qui traduit bien ce qu’il veut exprimer, qu’il renvoie la lumière et est durable, même s’il dit aussi que « les mots sont des pyjamas provisoires, rien n’est durable ». 

Tout droit venu de Rome après ses études, il apprend  dans les ateliers de La Cambre à souder, peindre, photographier. Diplôme en poche, il se lance dans la fabrication des décors de pub pendant quelques années avant de jouer à fond sur les mots. « AIMER, SMILE, ALHOB, INSIEME…» à l’aéroport de Charleroi, c’est lui. Ces mots dans toutes les langues qui mettent en joie avant de faire le pied de grue dans les files Ryanair. On l’a vu aussi dans les jardins du Musée Van Buuren, il y a peu. 


« Je ne suis pas un littéraire, dit celui qui cite Duras, et s’y retrouve si bien : Il y aura une écriture du non-écrit. Un jour ça arrivera. Une écriture brève, sans grammaire, une écriture de mots seuls. Des mots sans grammaire de soutien. Égarés. Là, écrits. Et quittés aussitôt. » 

Activiste du positif  

Sa lettre préférée est le A, comme Alessandro, A comme Amour et Art, A comme Aérien, ou Aphorisme. « J’aime la vie, c’est mon paradis de tous les jours. On a une chance incroyable d’être là, il faut en profiter à chaque moment », dit-il avec toute la saveur des  «r» qui roulent. C’est en italien que le plasticien conceptualise ses mots provocateurs d’énergie positive, hyper attentif  à trouver la juste formulation en français, parce que si les gens ne captent pas tout de suite, le concept est, pour lui, compromis.  

 

La poésie des cercles, place Guy d’Arezzo (c)Cilou de Bruyn

Ce sont ces émotions en chacun de nous, invisibles, qu’Alessandro Filippini veut rendre palpables et accroche aux arbres. « Mettre le feu à la vie des gens, dit-il dans un grand rire parce que  «le plus beau reste à venir. » Il crée pour partager cette force de joie qui l’habite tout le long de ce cheminement vers :  « ALLANT AMOUR IR, le mouvement, l’amour, la mort.» 

Quelle place pour le doute dans tout ça ? « Ah le doute! Le doute magique, mon cher doute, racine du progrès, porte ouverte, sève de l’attention.» 

Sur rendez-vous : Le Beau a une adresse, 313 avenue Molière,  0470/91.04.18.  http//www.lebeauauneadresse.com


ART PUBLIC 
Les cercles poétiques d’Alessandro Filippini sont à découvrir place Guy d’ Arezzo et square Charles Lagrange (devant l’Observatoire) dans le cadre du dispositif ART PUBLIC, dont l’objectif est de favoriser la présence de l’art dans l’espace public de la commune d’Uccle.  

« Nous avons exposé ces dernières années sur nos places les sculptures d’Isabelle Thiltgès, les céramiques de Franck Sarfati, les bronzes de François Canard et de Pierre Rulens, et plusieurs photographes sur les grilles des parcs », précise l’échevine de la Culture, Perrine Ledan. Ces opérations nécessitent l’intervention de plusieurs services communaux (voirie et services verts notamment) avec une logistique bien étudiée en collaboration avec l’artiste. Celui-ci met gracieusement ses œuvres à la disposition de la commune qui finance entièrement l’installation. «Je connaissais déjà les œuvres d’Alessandro Filippini, précise Perrine Ledan. J’aime beaucoup ces cercles de mots et la transmission de messages symboliques optimistes. »  

De la culture, de l’animation et du beau dans notre espace public !