Dans  » JE NE SERAIS PAS ARRIVÉE LÀ SI… « 

Quelle idée d’adapter pour la scène des interviews publiées dans Le Monde ! Mais la journaliste est Annick Cojean, un monument d’empathie, doublée d’un talent d’écoute exceptionnel. Rien d’étonnant, dès lors, que les intellectuels, les artistes, les écrivains se confient à elle. Elle les apprivoise et tisse lentement un portrait en profondeur par un ping-pong verbal qui restitue l’intimité ; avec hésitations, émotions, rires.

« Les femmes que j’interroge sont déjà des personnages. Je pars en quête de la personne derrière le personnage. » Annick Cojean

La comédienne Judith Henry a tout de suite perçu la vibration théâtrale qui perçait sous la langue. Résultat : ce très original spectacle à deux voix où chaque comédienne incarne alternativement l’intervieweuse et l’interviewée. Ça n’est pas facile car il ne s’agit pas de « mimer » l’une et l’autre. Elles restent elles-mêmes, Judith et Julie, tout en glissant, texte en main, dans l’esprit de la personnalité qui prend vie à travers elles. Virginie Despentes, Gisèle Halimi, Amélie Nothomb, Christine Taubira… six femmes répondent à leurs questions sur leur parcours. Chacune raconte ses difficultés, l’ostracisme qu’elle ont dû combattre ou les outrages qu’elles ont subis. On rit souvent car elles ont beau en avoir bavé, toutes gardent leur sens de l’humour. Et on en ressort… régénéré(e).

“ Les comédiennes Judith Henry et Julie Gayet donnent vie à des interviews
exceptionnelles. ” L’Obs
“ Chaleureux, naturel, complice, un moment rare. Il ne faut pas
le rater. ” Paris Match

L’INTERVIEW DE JULIE GAYET

Radieuse, passionnée, sincère, rieuse, engagée… c’est Julie Gayet. Que l’on retrouvera sur la scène du CCU dans  » Je ne serais pas arrivée à. si… » . Le 11 octobre prochain.

De gauche à droite, Judith Henry, Annick Cojean et Julie Gayet

Comment s’est faite votre rencontre avec le spectacle « Je ne serais pas arrivée là, si… » ?
« C’est une proposition directe qui m’est venue de la comédienne Judith Henry, qui à la suite d’une lecture du livre d’Annick Cojean « Je ne serais pas arrivée là si…, 27 femmes racontent» a trouvé qu’il y avait quelque chose à faire avec cette écriture si emphatique
et avec cette question, absolue et fascinante. Question qui nous oblige à faire un pas de côté et à nous dire « mais, au fait, oui, pourquoi et comment en suis-je arrivée là ?
Judith Henry est ensuite venue me chercher pour des lectures de ces mêmes textes au Festival Paroles de citoyennes. Ensemble, on en a fait un tri, à partir d’une vingtaine d’interviews de ces femmes puissantes, on en a gardé douze, puis dix jusqu’à
l’évidence des six dernières personnalités retenues. Ces Six offraient une belle résonance entre elles, et n’étaient pas forcément toutes féministes. Gisèle Halimi oui, Amélie Nothomb, non. Mais elles étaient au même diapason sur le reste, la condition des
femmes, leur rapport à leurs mères, leur rapport aux violences… L’idée nous est venue d’en faire un spectacle. »
Dans quelle mesure ce spectacle rejoint-il votre implication dans La Fondation des femmes ?
« Je suis très active au sein de La Fondation des Femmes qui soutient
toutes les associations de femmes en France et qui est apparue au
moment où on a été percuté par l’affaire Weinstein, le mouvement
Metoo, la manif anti-mariage pour tous en France… Et donc, un
spectacle qui fait découvrir le parcours de femmes qui ont « réussi »
est très inspirant et nécessaire aujourd’hui. En voyant ce spectacle, on
se rend compte à quel point des voix plus anciennes, comme celle de
Gisèle Halimi, résonnent de manière très contemporaine aujourd’hui.
On connaît moins Nina Bouraoui, l’auteure, mais son portrait sur
scène et ce qu’elle raconte sur la réaction au Mariage pour Tous, sur la
différence, sur la fragilité des choses qui ne sont jamais acquises, me la
rend particulièrement touchante, et drôle, car comme tous ces modèles
de femmes elle a, heureusement, beaucoup d’humour.
Finalement, ces interviews permettent de se rappeler la phrase de
Gisèle Halimi : « Quand est-ce que les femmes se regrouperont et
comprendront qu’ensemble elles ont une force incroyable ? »
Et justement, puisqu’on en parle Julie Gayet, vous, vous ne seriez pas arrivée là si…?
« (Rires )… alors « Je ne serais pas arrivée là si … » probablement, si je n’avais pas eu des femmes dans ma famille comme une arrière-grand-mère (Thérèse Gayet) qui a été une figure incroyable, qui a fait partie des trois premières femmes médecins en France.
Et qui, sûrement, m’a permis d’ouvrir le champ des possibles, je pouvais m’autoriser à choisir ou en tous les cas à ne pas m’interdire et à ne pas m’autocensurer, et qui m’a donné surtout cette image d’une femme indépendante qui gagnait sa vie, et ça, je dois avouer qu’avoir eu des figures de femme comme elle, ça été très très important. Après, je ne serais pas arrivée là non plus si je n’avais pas fait toutes ces rencontres que l’on fait dans la vie, et parfois merveilleuses, et si je n’avais pas rencontré François*, je ne serais peut-être pas non plus arrivée là…(rires). »

*François Hollande, ancien Président de la République Française (2012-2017)