Les clefs du sol
La chronique de Semance, comptoir citoyen de production et d’échange libre de semences, traditionnelles, oubliées ou encore inconnues dans nos contrées, né au Homborch.
L’hiver est bien installé. Partout autour de nous, nous pouvons voir que la nature est au repos. Mais pour les jardiniers expérimentés ou en herbe que nous sommes, c’est justement l’occasion de se préparer au printemps prochain et d’expérimenter de nouvelles techniques de jardinage. Et cette année, pourquoi pas faire soi-même son propre terreau ?
À l’arrivée des beaux jours, on plante, on rempote… Le premier réflexe est de se rendre en magasin pour refaire les indispensables réserves de terreau. Logique. Pourtant, ce terreau de semis, dit « universel », ou de terre acide (ou « de bruyère »), pour ne citer que les plus courants, coûte cher, produit quantité de déchets plastiques et a parfois une provenance incertaine (par exemple, les tourbières millénaires exploitées pour le jardinage). Existe-t-il d’autres options? Et pourquoi pas produire soi-même son terreau, bien tamisé, de meilleure qualité et aux quantités nécessaires ?
L’association uccloise Semance, constituée d’horticulteurs semenciers amateurs et bénévoles, s’est lancée dans la fabrication de ses propres terreaux à partir de ressources locales (broyats, déchets verts, compost de quartier, bokachi de cuisine des bénévoles). À la différence des terreaux proposés en magasin, ce sont des terreaux renforcés de micro-organismes, puissamment antioxydants et dépolluants apportant un plus en termes de nettoyage et de dynamisation du sol. Au final, ce sont les cultures et les jardiniers qui sont gagnants.
www.semance.be
Trois questions à Stefania Cao
Spécialiste de la réalisation de bokachi
1. Qu’est-ce que le bokachi (ou bokashi) ?
Le mot bokachi veut dire « matière organique bien fermentée » en japonais. C’est une façon efficace et pratique de précompostage de tous nos restes alimentaires, au moyen d’une étape de fermentation contrôlée, sans moucherons ni moisissures, en anaérobie, c’est-à-dire sans oxygène, dans un contenant fermé. On peut recycler ainsi tous les restes alimentaires : crus, cuits, même les restes de pain, pâtes ou encore de viande, poisson ou fromage. C’est possible grâce à l’activateur de bokachi, imprégné d’un mélange de bactéries positives, aussi appelées EM (de l’anglais Effective Micro-organisms). Les EM vont prédigérer nos aliments, comme le ferait le microbiote de nos intestins. C’est la terre que nous nourrirons ensuite avec ce digestat. Tous les nutriments rendus disponibles par la fermentation enrichiront aussi le sol en carbone, le rendront vivant. Ce sont nos plantes qui profiteront de ce magnifique terreau produit à partir de…déchets !
2. Comment se passe la fabrication du terreau avec Semance ?
Fabriquer un terreau en coopérant avec d’autres experts de l’utilisation des EM sur le terrain, tels que les bénévoles de Semance, est un moment enrichissant. Car le moteur commun qui nous guide est l’autonomie et la réutilisation des ressources que nous avons à disposition. Au lieu d’utiliser de la tourbe, nous avons effectué un mélange de compost classique mûr et tamisé auquel nous avons ajouté du broyat de résineux mûr, du sable de rivière et du bokachi de pomme-paille. Ce mélange reposera tout l’hiver dans une fosse bâchée. Au printemps, ce terreau à base de matières 100 % recyclées, et issu d’une dynamique citoyenne d’économie circulaire, sera utilisé dans les différents terrains de Semance.
3. Comment se procurer les indispensables EM ?
Les EM se déclinent sous différentes formes plus ou moins prêtes à l’emploi et à utiliser au jardin, dans la maison ou pour l’hygiène et le bien-être personnels. Un livre spécialisé (1) est une bonne boussole pour se lancer. Vous trouverez tous les conseils pour démarrer et vous lancer dans votre propre production de bokachi sur www.bokashicompost.be.
- Semance a édité et diffuse un livret d’initiation aux EM et au bokachi, à la fois accessible et complet.